En 2023, le tabou de l’incontinence demeure encore d’actualité. Comment imaginer que parler soit aussi difficile malgré la médiatisation de ce symptôme ? Pourquoi une honte tenace et mortifère retarde-t-elle le traitement de votre incontinence ? Pourtant, vous taire signifie le repli sur soi, la perte de chance d’un traitement rapide et de l’occasion d’intégrer un groupe de paroles salvateur.
L’incontinence, toujours difficile d’en parler
Fuite d’urines ou de selles involontaire, l’incontinence concerne environ cinq millions de personnes, tous âges confondus. La médiatisation ne lève pas le tabou sur ce symptôme. Les personnes concernées ont souvent honte de révéler leur condition et d’en parler avec leur entourage. Pourtant, oser briser ce silence est la première étape pour sortir de l’isolement et trouver des solutions.
Pourquoi ce tabou sur l’incontinence ?
Il est étonnant que l’incontinence reste un sujet tabou alors qu’un tiers des Français sont concernés par ce symptôme. Ce tabou est lié aux croyances et à l’idée d’impureté : la honte est souvent liée à des questions renvoyant à la sphère sexuelle et anale.
Une honte différente selon le type de symptôme
Il est déjà difficile de parler à son médecin d’une incontinence urinaire, mais c’est encore plus difficile pour une incontinence fécale. Cette fuite incontrôlable et répétée de selles liquides ou solides n’est presque jamais abordée devant le médecin traitant. L’incontinence anale renvoie à la saleté, aux excréments et à leur odeur nauséabonde. Cela peut limiter la vie quotidienne, les déplacements, les activités familiales et relationnelles.
Une honte différente selon le sexe et l’âge
57 % des moins de 35 ans considèrent l’incontinence comme un sujet tabou. Les mentalités assimilent difficilement l’idée de jeunesse à celle du port de protections. C’est au contraire la période de pleine capacité, loin du manque de contrôle de l’enfance ou des insuffisances du vieillissement. La honte est d’autant plus grande pour les 2 % d’adolescents atteints de fuites urinaires.
En revanche, l’avancée en âge fait reculer le tabou de l’incontinence. Sans doute en raison d’une idée fortement enracinée : aucune personne âgée, homme ou femme, n’échappe aux fuites urinaires. Il est vrai que le vieillissement réduit la capacité de la vessie, provoque un affaiblissement musculaire et un contrôle plus difficile de la miction. Ainsi, selon une enquête IFOP de 2018, 13 % des 65-74 ans et 23 % des plus de 75 ans sont personnellement concernés. La grande majorité des personnes âgées échappe donc aux problèmes d’incontinence fécale ou urinaire.
Quant au paramètre du sexe, les hommes se taisent plus volontiers : leur incontinence est souvent liée aux dysfonctionnements de la prostate qu’ils assimilent à une perte de virilité. Ainsi, 3 à 5 % des quadragénaires, 10 % des sexagénaires et le tiers des nonagénaires sont atteints de fuites urinaires. Pour cacher leur incontinence, les hommes prennent plusieurs douches quotidiennes et changent de protections au moins trois fois par jour. Ces comportements amoindrissent leur qualité de vie et conduisent à diminuer les interactions sociales. La gêne surpasse tous les inconvénients du silence et retarde l’action thérapeutique.
Parler pour revivre
Le silence sur l’incontinence rend invisibles les personnes qui en souffrent, les isolant davantage. C’est pourquoi il est important de parler de ce symptôme pour pouvoir trouver des solutions et améliorer sa qualité de vie.
Plus de honte devant les proches
Parler à ses proches, est-ce si facile ? Non, mais cela vous permet d’envisager le symptôme sous un jour nouveau. Le conjoint, souvent le premier averti, peut s’adapter à la situation, surtout si votre couple est ensemble depuis longtemps. Le degré d’intimité permet de dédramatiser les fuites.
Quant aux amis, ils demeurent une source inépuisable de soutien et de partages. Vous pouvez fort bien trouver des moments propices pour apprendre que l’incontinence… les concerne également et qu’ils en ont déjà parlé à leur médecin.
Plus de honte devant les professionnels !
Parler de son incontinence à un professionnel de santé peut permettre d’obtenir un traitement sérieux et adapté. Les généralistes, urologues, gynécologues et kinésithérapeutes peuvent offrir une large gamme de solutions, de la rééducation périnéale aux régimes alimentaires en passant par les protections adaptées et les médicaments.
Oser les groupes de paroles !
A priori, cela peut vous gêner d’exposer votre incontinence devant des inconnus. La pratique des réseaux sociaux a beaucoup contribué à éliminer cette hésitation. Des groupes s’organisent aussi sur des forums, des réseaux sociaux, dans des hôpitaux ou des associations. Certains patients deviennent de véritables experts qui vous apporteront une aide précieuse. Des pistes à explorer sans faute !
Quelques mots sur l'auteur :
Pr. Haab
Cet article a été rédigé en collaboration avec le comité scientifique de Sphère Santé, composé de médecins spécialisés en urologie et en chirurgie.
Le comité scientifique de Sphère-Santé a pour rôle de définir la ligne éditoriale des rubriques L'incontinence" et Les solutions. Les autres rubriques du site sont sous la responsabilité exclusive de Sphère-Santé.
Date de publication : 03/08/2023
Cet article ne remplace pas le diagnostic de votre médecin. Si vous souffrez d'incontinence, consultez votre médecin traitant ou un médecin spécialiste urologue ou gynécologue